L’Union européenne est sur le point de voter une nouvelle directive qui va révolutionner le monde de la communication au niveau des allégations environnementales. On vous explique tout.
Le constat est simple: les citoyens n’ont aucune confiance dans les marques lorsqu’elles communiquent sur leurs engagements écologiques. C’est logique en soi car on voit tout et n’importe quoi. Du greenwashing mais aussi une prolifération d’expressions (produits naturels, biologiques, neutre en carbone, etc.) et de labels.
C’est pourquoi l’UE veut encadrer toutes les allégations environnementales (Green Claims en anglais) pour qu’on puisse s’y retrouver.
Avant de débuter, définissons brièvement ce qu’est une allégation environnementale. C’est tout message sous n’importe quelle forme (texte, image, label..) dans le cadre d’une communication commerciale qui affirme qu’un produit / service organisation a un impact positif (ou nul) sur l’environnement ou est meilleur que des concurrents au niveau écologique.
Notez qu’au moment d’écrire ce texte (début décembre 2023), la directive n’a pas encore été votée au Parlement européen. Elle est passée par la Commission qui l’a envoyée au Parlement. Normalement, à ce stade, la directive devrait passer. Mais il devrait très probablement encore y avoir des amendements. Cet article est donc une analyse du texte aujourd’hui, mais des changements pourraient encore avoir lieu. Affaire à suivre donc.
Maintenant qu’on est sur la même longueur d’onde, passons dans le vif du sujet avec les 5 grands changements que cette directive va apporter.
1. Les allégations environnementales génériques seront interdites
C’est un énorme changement qui s’annonce. Toute expression vague comme écoresponsable, durable, bon pour la planète, neutre pour le climat, etc. sera purement et simplement interdite. On ne pourra plus les utiliser lors d’une communication externe.
C’est une bonne chose car ces termes sont trop forts et disproportionnés. C’est un cas-type de greenwashing, la promesse disproportionnée. Car il y a une disproportion entre l’allégation et la qualité écologique réelle du produit ou service. Et cela risque de tromper le consommateur.
Exit donc les avions durables, les Iphones neutres pour le climat ou les produits ménagers bons pour la planète. Les marques engagées seront également impactées. Car elles utilisent régulièrement de tels termes. Même si c’est souvent basé sur une réelle amélioration des qualités environnementales, cela reste trop fort comme allégation et cela doit être évité.
Privilégiez donc des allégations environnementales explicites. C'est-à-dire une allégation qui précise en quoi le produit ou service est plus “durable”. Par exemple, “70% de plastique en moins” ou “faits à partir de matériaux 100% recyclés”. Avec de telles expressions, on comprend directement l’impact positif.
2. Toute allégation environnementale explicite devra être vérifiée par un organisme tiers
C’est LE gros changement qui va révolutionner le secteur. Un problème majeur de la publicité est qu’il n’y a aucune vérification a priori. Il y a uniquement une vérification si une plainte est déposée (donc a posteriori). Le mal a donc déjà été fait car la publicité a déjà été diffusée.
Avec cette directive, il faudra un certificat de conformité délivré par un organisme tiers agréé (point encore à définir dans la directive). Autrement dit, pour dire que vous utilisez x% de matériaux recyclés, quelqu’un d’externe devra vérifier si c’est bien le cas. Avec de réelles preuves à l’appui. En fonction de l’allégation, de réelles preuves scientifiques devront être disponibles. Il faudra également mentionner si l’allégation est liée à l’ensemble du produit ou à une partie du produit. Bien entendu, on ne pourra communiquer sur une allégation que si celle-ci est supérieure à la loi.
Notez que cette règle ne s’appliquera pas aux TPE (moins de 10 employés ou en-dessous de 2M de CA). Pour les PME au-dessus de ce critère, des aides financières devraient être mises en place, mais c’est encore un point en discussion.
3. Plus de neutralité carbone et une obligation d’être précis sur la compensation
C’est un corollaire du point 1: on ne pourra plus dire qu’un produit, service ou une organisation est neutre en carbone ou neutre pour le climat. C’est en effet une allégation environnementale générique. D’autant plus qu’ici, cela trompe le consommateur en faisant passer le message qu’un produit n’a aucun impact environnemental. Alors que si, un équilibre comptable a juste été atteint via de la compensation.
En plus de cette interdiction, il sera obligatoire d’être précis sur la compensation: quel type de compensation, quels scopes ont été utilisés pour effectuer le bilan carbone, quelle période a été considérée, où a eu lieu la compensation, etc.
Notez que ce point est encore sujet à discussion et doit encore être confirmé dans le cadre de cette directive. Car une autre directive à ce sujet, Empowering Consumer, traite du sujet. Il faudra donc voir ce qu’il en sera concrètement au moment du vote final, après amendements.
4. Obligation de rediriger vers une page web ou un document lors d’une allégation environnementale
C’est en soi déjà quelque chose qui est préconisé par les jurys de déontologie publicitaire et les règles fixées par le secteur. Mais cela sera dorénavant encadré par une directive européenne. Il faudra ainsi toujours rediriger via un lien de redirection ou un QR code vers une page web où les citoyens pourront trouver plus d’informations. C’est clé pour qu’on puisse toutes et tous se renseigner et avoir accès à de l’information.
5. Des lourdes sanctions en cas de non respect
Aujourd’hui, sauf si vous réalisez une communication commerciale trompeuse grave, vous n’avez pas de sanctions à la clé. Le secteur est autorégulé et émet des notes négatives en cas de plainte acceptée, qui ont juste un effet symbolique et un potentiel bad buzz.
Avec cette directive, des sanctions seront mises en place, avec amendes salées, une potentielle confiscation des revenus voire une interdiction de marchés publics et des financements.
Il va donc falloir bien se préparer à cette nouvelle directive, qui va apporter son lot de changements dans le secteur de la communication et de la publicité. Mais cette directive reste une excellente nouvelle afin de lutter contre le greenwashing et donc de faciliter une réelle transition écologique.
Pour conclure, il faut ajouter que le champ d’application de la directive est encore assez flou, il y a encore plusieurs fragilités au texte. Nous suivrons donc de près les amendements apportés au texte.
Si cela vous intéresse, on a fait un webinaire sur le sujet avec Ecos et le label Longtime. Vous pouvez le retrouver ICI.
Notez également que cette directive se base sur les codes de la communication responsable. Donc si vous faites déjà bien les choses à ce niveau, vous n’aurez aucun souci. Mais ce n’est pas simple à réaliser car cela se joue sur de la nuance.
C’est pourquoi nous avons lancé un service d’accompagnement à la communication responsable et sans greenwashing chez GiveActions. Contactez-nous si cela vous intéresse.